France. Le contrôle « au faciès » scientifiquement prouvé.

Publié le par Un monde formidable

Le contrôle « au faciès » scientifiquement prouvé. La rédaction avec Steven Bellery (RMC.fr, 01/07/09)

Les contrôles de police se font au faciès. En France : les arabes et les noirs sont sur-contrôlés. C'est ce que prouvent des chercheurs du CNRS, étude scientifique à l'appui.

La police française pratiquerait à grande échelle des "contrôles au faciès". Une étude scientifique, conduite dans la plus grande confidentialité par le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) et financée par l'Open Society Institute, une fondation américaine créée par le milliardaire George Soros, montre que les forces de l'ordre effectuent des contrôles d'identité discriminatoires vis-à-vis des arabes et des noirs. Pour les premiers, la probabilité d'être contrôlés est en moyenne 8 fois plus élevée que pour des blancs ; pour les seconds, elle est 6 fois plus importante. Un exemple, à la station Châtelet à Paris la probabilité de contrôle des noirs est 11 fois et demie plus grande que celle des blancs.



« Les policiers centrent leurs contrôles sur une population »: Ces résultats ont été obtenus par l'observation du travail de policiers, à leur insu. Pendant près de 6 mois, les enquêteurs du CNRS ont analysé 525 opérations de police à Paris (à la gare du Nord et à Châtelet-Les Halles). En notant différentes caractéristiques, comme l'explique Fabien Jobard, l'un des chercheurs du CNRS à l'origine de cette enquête : « Outre les critères de sexe et d'origine apparente - du type noir, blanc, magrébin, etc -, on a choisi d'introduire d'autres caractéristiques. Par exemple, le type de sac porté, parce qu'on est dans des zones Vigipirate et le sac peut être un motif légitime de contrôle. On a aussi relevé les caractéristiques des personnes présentes sur les lieux aux moments des contrôles, afin de comparer avec les caractéristiques des personnes contrôlées.
Ce qu'on a relevé, c'est que quand il n'y a pas d'infraction manifeste préalable de la part de la personne qui va être contrôlée, les policiers centrent leurs contrôles sur une population qui partage toujours les mêmes caractéristiques. La population de ceux qu'ils identifient comme étant les fauteurs de troubles. L'étude montre que cette population est jeune, habillée de manière très distinctive - style "hip hop" -, masculine et au sein de laquelle les arabes et les noirs sont surreprésentés. »



« Un écart entre ce que la loi dit et les pratiques observées »: Pointant du doigt « un écart entre ce que la loi dit des circonstances dans lesquelles le contrôle d'identité est justifié, et ce que les pratiques peuvent suggérer », Fabien Jobard explique : « Il faut que le policier puisse dire sur quels éléments il a fondé sa décision. Et sa décision doit se rapporter au fait que la personne vient de commettre une infraction ou qu'elle s'apprête à en commettre une, ou qu'elle trouble l'ordre public.
On peut par ailleurs se demander si vérifier les cartes nationales d'identité - c'est-à-dire soulever des questions très profondes sur la nationalité, la légitimité d'être dans le pays, etc. - c'est véritablement le bon moyen, le plus approprié pour manifester l'autorité légitime... »



« En Angleterre, les policiers doivent donner les motifs du contrôle »: Forte de cette étude, l'Open Society Institute a émis certaines recommandations. Notamment, exiger des policiers qu'ils expliquent systématiquement les motifs du contrôle au citoyen concerné. Et comme l'explique Fabien Jobard, « ça se fait en Angleterre, où les policiers doivent remettre par ailleurs un rapport écrit à chaque contrôle effectué, à leur hiérarchie, dans lequel ils précisent notamment la couleur de peau de la personne contrôlée. Du coup, le nombre de contrôle a chuté. Mais j'ai 2 remarques à ce sujet : d'abord, la loi dit qu'il faut un motif pour contrôler l'identité d'une personne ; donc pourquoi ne pas le dire à la personne contrôlée ? Deuxièmement, nous avons relevé que dans 8 cas sur 10, le contrôle n'a pas de conséquence, pas de suite, la personne n'est pas conduite au poste. Donc, manifestement, le contrôle n'a pas d'utilité judiciaire. La Fondation recommande donc de concentrer les contrôles sur ceux qui peuvent avoir une utilité immédiate. »

A la préfecture de police de Paris, on explique que les policiers ont un libre-arbitre... Et qu'ils sont là pour prévenir les crimes et les délits...

Police: une étude du CNRS s’intéresse au délit “de faciès”. (Source Nouvelobs.com / 30.06.2009)

L’étude révèle que les “pratiques policières” se fondent davantage “sur la couleur de la peau” plutôt que sur le comportement des intéressés, comme l’exige le droit.
Des chercheurs du CNRS ont mené une étude “rigoureuse” sur les contrôles d’identité pratiqué par la police parisienne, rapporte, mardi 30 juin, le site Mediapart. Plus de 500 contrôles d’identité ont été observés pendant plusieurs mois et sur cinq sites parisiens.
L’étude révèle que “ces pratiques policières sont fondées principalement sur la couleur de la peau - et non pas sur le comportement des intéressés, comme l’impose le droit”, note le site d’information.

“Surreprésentation des minorités”: Les personnes perçues comme “Arabes” ont été 7 fois plus contrôlées que ceux perçus comme “Blancs”. A la station Châtelet-les-Halles, la probabilité de contrôle des “Noirs” est 11,5 fois plus grande que celle des “Blancs”.
L’enquête confirme ce dont “tout le monde se doute”, rapporte Mediapart. “En l’absence de quelque stratégie policière légitime qui l’expliquerait, le comportement de la police française dans ces cinq emplacements peut être assimilé au profilage racial.”
L’origine n’est pas le seul critère de contrôle, le style vestimentaire se révèle également déterminant. Si les personnes portant des vêtements associés aux “cultures jeunes” (hip-hop, tecktonic…) ne représentent que 10% de la population présente, elles représentent 47% des contrôlées.
“Il est probable que la police considère que l’appartenance à une minorité visible tout comme le port d’une tenue “jeune” sont étroitement associés à la propension à commettre des infractions”, considère le rapport. “Lorsque la police cible ce type de tenues, il en résulte une surreprésentation des minorités visibles, en particulier des Noirs, parmi les contrôlés.”

“Les jeunes sont la cible privilégiée”: L’étude note que les femmes sont, quelle que soit leur apparence, très peu contrôlées… sauf quand elles accompagnent un homme “ciblé” par les forces de l’ordre.
Fabien Jobard, un des auteurs de l’enquête, ajoute qu’en marge du plan Vigipirate renforcé (niveau “rouge), “les porteurs de sac ne sont guère contrôlés”. En effet, le rapport pointe que les individus ne portant “pas de sacs” sont les plus contrôlés.
Pour sa part, René Lévy, co-directeur de l’étude, déplore que “les jeunes soient la cible privilégiée” des policiers.
Aux vues de l’enquête, Mediapart s’interroge sur “l’efficacité des contrôles dans la détection des infractions”. Dans 78% des cas, les personnes contrôlées ont pu repartir sans être conduites au poste de police, avec toutefois une large proportion de fouille et palpation pour les “Noirs” et “Arabes”.

“Des critères objectifs” ?: De plus, le rapport met en lumière que “dans 60% des cas, l’individu contrôlé dit ignorer les raisons qui ont motivé l’intervention. Le préjudice que les pratiques de contrôle de police causent à la relation que la police entretient avec les personnes objet de contrôle est manifeste.”
Pour ce qui est du cadre légal en matière de contrôle d’identité (et de contrôle de l’immigration), la police “doit fonder les contrôles d’identité qu’elle réalise dans ce cadre sur des critères objectifs permettant de supposer raisonnablement que l’individu contrôlé est d’origine étrangère”.
Le Conseil constitutionnel a ainsi statué que les contrôles de l’immigration ne peuvent être en aucun cas motivés par des indicateurs discriminatoires. Les forces de l’ordre ne peuvent donc pas s’appuyer sur l’apparence physique d’une personne pour la contrôler.

Lancer “un vrai débat de société”: “L’existence et la nature du problème doivent être reconnues franchement et ouvertement par les autorités politiques et les institutions policières. Il s’agit de la première étape essentielle pour déboucher sur un vrai débat de société et sur des initiatives politiques”, recommande les initiateurs de l’étude.
Un débat qui irait dans le sens de Nicolas Sarkozy au Congrès de Versailles : “pour atteindre l’égalité il faut savoir donner plus à ceux qui ont moins. Il ne faut pas le faire sur des critères ethniques. Ce serait contraire à nos principes les plus fondamentaux.”
Et Mediapart de conclure : “Avec la présente étude sur les contrôles d’identité et leur discrimination, le débat peut être engagé !”

Publié dans Discriminations

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