Tchad. Chroniques d'une histoire sans fin (3)

Publié le par unmondeformidable

Tchad : les rebelles repartent à la conquête de N’Djamena  par Stéphane Ballong/  7 mai 2009,

Les premiers combats terrestres ont eu lieu près d’Am Dam, à 700 km de la capitale. Trois jours après l’incursion des rebelles dans l’est du Tchad, les premiers combats au sol avec l’armée régulière ont eu lieu jeudi matin dans l’est du pays. Chacune des deux parties revendique la victoire dans cette bataille. La France a appelé le Conseil de sécurité de l’Onu à condamner « fermement » cette offensive des rebelles. Une attaque menée depuis le Soudan au lendemain de la signature d’un accord de paix entre les deux pays

Rebelles et forces loyalistes se sont affrontés, ce jeudi au nord de la localité de Goz Beïda, pour la première fois depuis l’incursion des rebelles de l’Union des forces de la résistance (UFR) le 4 mai. Difficile, pour l’heure, de dire laquelle des deux parties a gagné ces combats. Si les deux camps confirment la tenue de « violents combats », ils affirment chacun les avoir remportés. « L’armée est aux trousses des rebelles », qui se replient vers le Soudan, a indiqué Mahamat Hissène, le porte-parole du gouvernement tchadien, joint par Afrik.com. Celui-ci a précisé que les combats se sont déroulés à Am-Deressa, à 10 km au sud d’Am-Dam (à près de 700 km de la capitale N’Djamena).

« Les combats ont été violents et ont duré des heures », confirme Abderaman Koulamallah, le porte-parole de l’Union des forces de la résistance (UFR), qui réunit neuf groupes rebelles. Ils affirment, contrairement au ministre, que la victoire leur est revenue. « Les troupes gouvernementales sont en totale débandade. Nous sommes plus de 1 000 véhicules », déclare-t-il. « Nous occupons totalement Am-Dam. L’objectif reste N’Djamena ». « L’armée est en mesure de faire face à la situation », affirme N’Djamena

La guerre de la communication bat son plein. A N’Djamena où la situation est calme, les citoyens vaquent tranquillement à leurs occupations. Interrogés par Afrik.com certains d’entre eux pensent que la vraie bataille se jouera à Mongo, une ville située au centre du pays et dont la prise faciliterait l’accès à la capitale. Mais Mahamat Hissène, le porte-parole du gouvernement, affirme que les rebelles n’y parviendront pas. « Nous y avons ouvert une nouvelle ligne de défense », indique-t-il. Avant Mongo, ajoute-t-il, se trouve une autre ligne de défense. D’après M. Hissène, les rebelles ont été mis en déroute, avant même d’avoir atteint cette dernière.

Pourtant, les rebelles affirment qu’ils progressent et que tout se déroule comme ils l’avaient prévu. Ils ont fait parvenir un message électronique à l’AFP. En février 2008, ils avaient traversé le pays d’Est en Ouest avant d’échouer à N’djamena aux portes de la présidence, face aux hommes restés fidèles au président Idriss Deby. Celui-ci aurait alors reçu le soutien des troupes françaises. Ce que dément le ministre tchadien. « Des amis nous avaient fourni du matériel. Mais ce sont nos hommes qui ont fait le travail sur le terrain », affirme-t-il, excluant toute répétition du scénario de l’année dernière. « Pour le moment nous sommes en mesure de faire face à la situation. Nous avons une légère armée aérienne qui nous permet de localiser les rebelles et de les contenir ». Selon le quotidien français Libération, les rebelles seraient regroupés en « trois à quatre colonnes », circuleraient à bord de quelque 400 pick-up, disposeraient d’armes flambant neuves et de moyens de transmission cryptés, fabriqués en Chine. « Ils seraient également équipés d’armes anti-aériennes, un atout qui inquiète beaucoup de monde au Tchad », écrit le journal.

Mercredi, à Paris, le chef de la diplomatie tchadienne, Moussa Faki Mahamat a rencontré son homologue français, Bernard Kouchner. Les deux hommes ont discuté de l’offensive rebelle. Les deux ministres auraient échangé sur des actions diplomatiques à mener pour faire face à la situation. Des accords militaires lient la France et le Tchad. Ils concernent l’aide logistique et la fourniture de renseignements à N’Djamena. La France a demandé à ce que le Conseil de sécurité de l’Onu « condamne fermement » cette offensive des rebelles dans l’est du Tchad. Une attaque qui aurait été menée depuis le Soudan.

 

Intenses batailles dans l’est du Tchad parJean-Philippe Rémy LE MONDE | 08.05.09

 Loin des yeux, loin des villes, une bataille décisive est en cours au Tchad. Depuis quatre jours, des rebelles tchadiens de l'Union des forces de la résistance (UFR) déployaient leurs colonnes dans l'est du pays, après avoir quitté leurs bases arrière du Soudan voisin. Vendredi 8 mai, les forces gouvernementales, qui attendaient cette offensive depuis plusieurs mois, les affrontaient pour la deuxième journée consécutive.

La veille, la première confrontation a eu lieu non loin d'Am Dam, à une centaine de kilomètres au sud d'Abéché, la grande ville de l'Est tchadien. D'après une source rebelle jointe par téléphone satellite, lors d'une communication très brève pour "éviter les interceptions", elle a été "dure et violente". En trois vagues successives, 7 000 à 8 000 soldats loyalistes de l'armée nationale tchadienne (ANT) se sont lancés à l'attaque d'une colonne rebelle forte d'environ 4 000 hommes. L'ANT avait reçu d'importants renforts matériels dans la perspective de cette opération.

Depuis la garnison de Mongo, verrou installé dans le centre du pays, l'ANT a fait route avec des orgues de Staline, des blindés et de l'artillerie de campagne. Avant l'attaque au sol, des hélicoptères d'attaque Mi-24 loyalistes, pilotés par des équipages étrangers, avaient bombardé les forces de l'UFR, très visibles dans cette région semi-aride malgré le mauvais temps.

Au bout de plusieurs heures, les combats ont cessé, mais leur violence est indéniable. "Les attaques ont été repoussées avec pas mal de casse. Mais ce n'est pas fini. Les combats ont repris depuis ce matin à 7 heures", expliquait au téléphone, vendredi matin, Acheikh Ibn Oumar, représentant de l'UFR en Europe. Il ajoute que les attaques des soldats loyalistes, la veille, se sont brisées sur les positions rebelles et qu'ils se seraient en partie "repliés en désordre vers Abéché, Am Timan et Mongo", alors que "trois chars ont été pris, des centaines de véhicules Toyota détruits". Les troupes gouvernementales ayant reçu des renforts, le second choc implique plus d'une dizaine de milliers d'hommes, fonçant à l'assaut à bord de pick-up en cherchant la confrontation directe et ouvrant le feu au lance-roquettes sur des véhicules bourrés de munitions et d'essence. "Par rapport à nos traditions, ce n'est pas disproportionné", commente M.Ibn Oumar, ancien combattant des guerres tchadiennes.
L'issue de la bataille, encore incertaine, devrait déterminer si l'aventure rebelle est stoppée net ou se poursuit. "Ça passe ou ça casse", affirme une source proche de la rébellion. Selon un communiqué de l'ANT, l'UFR aurait perdu 125 hommes plus 152 prisonniers.

La France, soutien traditionnel du président tchadien Idriss Déby, a condamné l'attaque rebelle. Les Etats-Unis ont appelé le Soudan à "désarmer et démobiliser tous les rebelles tchadiens présents sur son territoire"

 

Nouveaux combats au Tchad : qui destabilise qui ? Par Abdou Karim Sawadogo | L'Observateur Paalga. Ouagadougou| 08/05/2009 )

Une nouvelle fois, des rebelles tchadiens de l'Union des forces pour la résistance (UFR) sont rentrés dans l'Est du Tchad depuis le Soudan. 400 véhicules divisés en deux colonnes, avec la capitale tchadienne N'Djamena pour « objectif final ». Cette offensive des rebelles est d'autant plus surprenante que l'encre ayant servi à signer le nième et nouvel accord de paix entre les deux pays voisins n'a pas encore séché. Pas plus tard que le dimanche 3 mai, les deux Etats se sont engagés à ne pas s'ingérer dans les affaires intérieures de l'autre et à ne pas soutenir de groupes rebelles hostiles au vis-à-vis.

Cet engagement était important, dans la mesure où Khartoum et N'Djamena se regardaient en chiens de faïence et s'accusaient réciproquement de tentatives de destabilisation par groupes armés interposés. Signé à Doha sous les auspices de l'Emir du Qatar, du leader libyen Mouammar Kadhafi, et de l'Union africaine, cet énième accord devait, même si on ne se faisait pas trop d'illusion sur sa solidité, tenir en bride, au moins pour quelque temps, les velléités destabilisatrices des deux camps. Mais, hélas, il n'a tenu qu'à peine 48h et a donné la preuve, s'il en fallait encore, qu'Idriss Itno Deby et Omar El-Béchir se donnent des baisers de Juda pour mieux s'étrangler. Avec le mandat d'arrêt de la Cour pénale internationale qui lui pend au nez, on s'attendait à ce que le dirigeant de Karthoum se résolve à étendre le cercle de ses amitiés en commençant par ses voisins. Avec les relations excécrables qu'entretiennent les deux souverains, il est évident que la normalisation des relations soudano-tchadiennes n'est pas pour demain, car, dans nos pays à démocratie bananière, où les institutions n'existent que par simple formalité, les relations entre les peuples voisins sont on ne peut plus conditionnées à l'humeur de leurs dirigeants.

C'est justement ce genre de conflits inutiles qui mettent nos Etats en retard sur le chemin du développement. A force de s'obnubiler à destabiliser l'autre tout en se donnant les moyens de sa protection, seuls comptent les armes, les mercenaires et tout ce qui s'en suit. Dans ce duel Deby/Béchir par maquisards interposés, les seuls perdants sont leurs peuples.

Le premier, qui a failli perdre le pouvoir en juin 2008 par suite de l'entrée des rebelles à N'Djamena, n'entend plus se laisser surprendre. Avec l'argent du pétrole, il s'est réarmé jusqu'aux dents et, mieux, a réorganisé son armée de telle sorte que « l'objectif final » de ses ennemis ne sera pas une partie de plaisir. La France, qui a volé à son secours l'an dernier, ne restera certainement pas les mains croisées en cas d'imminence de la chute de son allié. Elle vient d'ailleurs de hausser le ton en demandant la condamnation ferme de l'attaque par le Conseil de sécurité de l'ONU. Si Itno arrive à repousser l'offensive, comme il le promet, il ne manquera pas de reprendre des forces et de répondre, à la manière du berger à la bergère, en actionnant, lui à son tour, son réseau au Darfour. Les conditions sont donc réunies pour que cette région fasse un pas vers le précipice. Sa richesse en or noir n'aura, en rien, servi à son développement. Elle est peut-être victime de ses richesses comme bien d'autres sur le continent, et les responsables de ce chaos ne sont pas qu'Africains

 

L'Union des forces de la résistance (UFR) est une alliance de mouvements rebelles tchadiens, regroupant l'Union démocratique pour le changement (UDC) d'Abderaman Koulamallah, le Front pour le salut de la République (FSR) de Ahmat Hassaballah Soubiane, le Rassemblement des forces pour le changement (RFC) de Timan Erdimi, l'Union des forces pour la démocratie et le développement (UFDD) du général Mahamat Nouri, l'Union des forces pour le changement et la démocratie (UFCD) de Adoum Hassabalah, l'Union des Forces pour la démocratie et le développement-Fondamentale (UFDD-F) d'Abdelwahid Aboud Makkaye, le Conseil démocratique Révolutionnaire (CDR) d'Albadour Acyl Ahmat Achabachet le Front populaire pour la renaissance nationale (FPRN) d'Adoum Yacoub Koukou. Cette alliance a été signée à la mi-janvier 2009 à Hadjer Marfain, localité du Soudan (Darfour) à la frontière du Tchad.

Les mouvements ont désigné le 24 janvier 2009 Timan Erdimi, neveu du président Idriss Déby, président de cette alliance. Quelques heures après cette nomination, la sœur ainée d'Erdimi est assassinée dans la capitale.

Adouma Hassaballah Djadarabest le premier vice-président du mouvement, Abdelwahid Aboud Makkayele deuxième vice-président, le secrétaire général est Abakar Tollimi, le délégué aux armées Adoum Yacoub Koukou et le délégué à la communication - porte-parole est Abderaman Koulamallah

Publié dans Afrique centrale

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article