Sénégal. Les femmes payent un lourd tribut de l’inapplication des textes
Les femmes payent un lourd tribut de l’inapplication des textes par Ibrahima Diallo. (Source : Sud On Line. 25 mars 2009).
Au Sénégal, les femmes sont les plus nombreuses à être victimes des violences physiques et verbales ou psychologiques et physiques que les hommes indique un rapport de l’Unifem. Ces comportement vont du viol aux injures en passant par le dénigrement.
Le 8 mars dernier a été célébré la Journée mondiale de la femme. A cette occasion, l’Unfpa et l’Unifem ont publié un rapport (daté de décembre 2008) sur la « Situation des Violences basées sur le genre (Vbg) » au Sénégal. Suivant la classification et la fréquence, les femmes sont proportionnellement les plus nombreuses à être victimes des violences, aussi bien verbales ou psychologiques que physiques, que les hommes. Les violences verbales ou psychologiques vont des insultes aux paroles de dénigrement explicites en passant par une élévation de ton à des fins d’intimidation, des paroles de dénigrement implicite, des formes d’évitement par la parole au cours des 12 derniers mois les violences institutionnelles et la violence économique et sociale.
Pour ce qui est de la violence physique, l’enquête par sondage révèle qu’elles vont des coups et blessures aux violences sexuelles en passant par les brûlures à l’huile, à l’eau chaude, à l’acide, etc. Dans la catégorie des violences sexuelles, l’on rencontre les tentatives de viol, les attouchements sexuels sans consentement, les coups et contraintes physiques pour avoir des rapports sexuels. A cela s’ajoutent le viol collectif, le viol avec menace d’arme, le harcèlement sexuel et la menace de viol.
Si toutes les localités concernées par l’enquête sont touchées, Ziguinchor enregistre les fréquences les plus élevées de tentatives de viol, de rapports sexuels sous la contrainte et les coups. La zone rurale de Kolda a le plus grand nombre de cas d’attouchements sexuels sans consentement et de cas de menaces pour avoir des rapports sexuels. Matam détient le record des cas de viol au cours duquel la victime a été attachée ou au cours duquel, on lui a fait boire des substances illicites pour lui faire perdre son contrôle de soi précise le rapport. La précarité des conditions d’existence, l’âge, les antécédents de violence et le niveau d’instruction sont apparus (selon le modèle de régression logistique) associés au fait d’avoir été victime de viol ou de tentative de viol.
Par ailleurs, environ 6 % des femmes affirment avoir subi au cours de leur vie des formes de violence physique qui leur ont occasionné un avortement non désiré ou une perte de grossesse. Ce type de réponse a été enregistré dans toutes les localités. Les pourcentages les plus élevés se trouvent à Ziguinchor, suivie de Kolda. 4 % des femmes indiquent également avoir eu au moins une grossesse, suite à un viol ou à un rapport sexuel non désiré. Ces cas ont été enregistrés dans toutes les localités avec, là aussi, la prévalence la plus élevée enregistrée à Ziguinchor.
Selon l’enquête, le milieu domestique apparaît comme chargé de violence (coups et blessures, viols, attouchements sexuels). Les données de la recherche qualitative montrent que la violence entre femmes est souvent associée à la forte densité dans des espaces d’habitation réduits et que la violence conjugale résulte souvent de la dégradation de la relation affective au sein du couple. Les mariages forcés ont été signalés dans toutes les régions étudiées. Les fréquences les plus élevées se retrouvent dans la zone rurale de Kolda et à Tambacounda. La séparation des enfants de leur milieu familial et l’excision ont aussi été signalées (à des degrés divers) dans toutes les localités d’enquête
L’enquête signale, par ailleurs, une fréquence élevée de viols, de tentatives de viol, d’attouchements sexuels, et d’agressions physiques subies par les femmes utilisant les transports publics. Elle révèle aussi 28 personnes ont affirmé avoir été victimes de vol alors qu’ils étaient dans un espace contrôlé par des membres de corps militaire ou paramilitaire. Les femmes plus nombreuses à mentionner y avoir subi des attouchements sexuels et des tentatives ou des cas de viol.
Pour les violences verbales aussi, Ziguinchor, Matam et Tambacounda ravissent la vedette aux localités. Mais, on peut toutefois suspecter que, à Dakar, une partie peut-être importante des cas n’ait pas été notifiée. Dans certaines zones de Dakar, on assiste à une sorte de banalisation des termes et des expressions considérés comme étant des insultes dans d’autres localités. Là « les insultes sont tellement fréquentes qu’elles ne sont plus des insultes » note le texte.
Pis, les entretiens qualitatifs montrent qu’une partie importante de la violence verbale a des motivations sexuelles en cas de refus de rapports sexuels. L’épouse, la fiancée ou la petite amie peut être victime d’insultes, de menaces ou d’autres formes de violence verbale, La menace de viol peut aussi être proféré dans une altercation pour signifier le désir de « détruire » la femme fait remarquer la source. Au total, plus de deux tiers des personnes interrogées affirment avoir été insultés quand ils avaient moins de 13 ans, avec des différences significatives entre garçons et filles (les garçons étant proportionnellement plus nombreux à rapporter avoir subi des insultes à l’âge de 0 à 12 ans).
Pourtant, le Sénégal a ratifié la plupart des conventions internationales concernant la protection contre les Violences basées sur le genre (Vbg). Il a aussi adopté des lois sanctionnant diverses formes de violence faites aux femmes (Mutilations génitales féminines (Mgf), harcèlement sexuel, violences conjugales, etc.). Cependant, Selon Maxim Houinato, directeur régional adjoint du Fnuap, l’application de ces textes pose problème pour plusieurs raisons. L’harmonisation de ces instruments juridiques internationaux avec les lois nationales n’est pas encore effective. S’y ajoute le fait que les textes en vigueur ne prennent pas suffisamment en compte les mécanismes traditionnels de prévention des violences.
Cette étude a pour objectif de « contribuer à prévenir les violences faites aux femmes au Sénégal ». Il s’agit de l’établissement de la prévalence des Vbg, des facteurs qui y sont associés et cartographie de la distribution des cas de Vbg, de l’analyse des moteurs socioculturels de la production et de la reproduction des Vbg. Il y a aussi l’analyse des besoins de protection et de prise en charge des victimes, l’analyse des institutions de recours, de réponses, de prises en charge et des capacités de réponses et des propositions de réponses politiques, institutionnelles et communautaires. L’étude basée sur des méthodes de recherche qualitative et de recherche quantitative concerne les régions de Dakar, Matam, Kolda, Tambacounda et Ziguinchor.