RDC. Viols : le corps des femmes comme champ de bataille

Publié le par unmondeformidable

“Ce que je voudrais?” Les femmes prennent la parole dans l’Est du Congo

http://www.condition-critical.org/fr/what-do-you-wish-for-women-speak-out-from-eastern-congo/

La sanction du viol

http://www.condition-critical.org/fr/the-penalties-of-rape/

Le viol, fléau de la République démocratique du Congo (Source Unicef - 21 août 2006)

De nombreux enfants figurent parmi les victimes. Des travailleurs sociaux essaient de redonner espoir à une génération qui ne fait plus confiance aux adultes.

À Kisangani, par delà l'épaisse forêt, sur les rives embrumées qui bordent le fleuve Congo, des milliers de miliciens et de soldats gouvernementaux ont établi leur camp. C'est une audacieuse expérience destinée à unir les anciens ennemis, une étape vitale pour assurer un avenir de paix au pays. 

Mais les femmes et les enfants de la région continuent à subir les conséquences douloureuses de la présence de ces ex-combattants. 

« Ici, les violences sexuelles sont devenues un phénomène quotidien, raconte Michel Magayane, un travailleur social. Nous entendons parler de nouveaux cas chaque jour ». 



M. Magayane dit que la majorité des auteurs de ces violences se trouvent chez les militaires et il pense que plus de 70% des cas de viol impliquent comme victimes des enfants. La plus jeune victime qu'il ait rencontrée avait quatre ans 

Bien que les combats aient cessé à Kisangani, les violences sexuelles constituent les séquelles principales de la guerre qui a déchiré la République démocratique du Congo (RDC).

Le viol, arme de guerre

Sélina, 12 ans, est assise dans une pièce sombre, habillée d'une robe rose ornée de rubans blancs. Elle porte encore visiblement les marques de l'horreur qu'elle a subie et doit faire des efforts pour raconter son histoire : « J'étais en train de prendre de l'eau quand j'ai senti que quelqu'un arrivait derrière moi, se rappelle-t-elle, j'ai vu que c'était quelqu'un en uniforme. Il a ramassé une pierre et me l'a enfoncée dans la bouche avant de m'entraîner dans des buissons ». Personne n'a entendu ses cris de la route voisine et le soldat a entrepris de la violer. Quand des gens sont finalement arrivés à son secours, il avait pris la fuite. 

L'histoire de Sélina est choquante mais loin d'être rare. On pense que des centaines de milliers de femmes et d'enfants ont été violés en RDC. 

« Pendant la guerre, le viol a été utilisé comme arme pour humilier les femmes et briser les familles, explique le professeur Pierre Kalala, un psychologue qui a travaillé dans toutes les régions du pays les plus touchées par ces violences. La plupart des femmes vivent dans la peur ».

Le danger des maladies sexuellement transmissibles

Le viol accompagné de violences peut entraîner des dommages physiques à long terme, particulièrement dans un pays où les soins de santé sont pratiquement inaccessibles. La plupart du temps, les fistules ne sont pas traitées et les maladies sexuellement transmissibles ne sont pas détectées. Les femmes fuient leur district pour échapper à la stigmatisation sociale qui les marque.

À Kisangani, les auteurs des viols se vantent fréquemment de leurs « conquêtes » et ces agressions aboutissent rarement devant un tribunal. 

Les hommes utilisent le paravent des superstitions locales pour commettre de terribles forfaits. Ils prétendent que violer une jeune fille apporte chance en affaires et argent. À Kisangani, une fille de neuf ans a été violée par un adolescent et a du passer deux mois à l'hôpital. Quand il la rencontre, le coupable continue à la harceler. Ici, les plus vulnérables se voient rarement rendre justice.

Une bombe à retardement

Si rien ne change, la RDC sera devant une véritable bombe à retardement. Le système de santé du pays étant pratiquement inexistant, le VIH/sida a le champ libre pour se propager. On estime que dans le pays plus de 1,1 million de personnes sont séropositives. Les femmes et les enfants violées par des militaires courent un risque bien réel de contracter la maladie. 



Cependant, dans cette situation terrible, brille un peu d'espoir : les enfants se réunissent dans des groupes où ils et elles peuvent parler de sujets tels que la violence sexuelle. Ils résistent à la génération adulte en parlant ouvertement de questions sensibles et en se protégeant par eux-mêmes. Les jeunes discutent ouvertement de questions comme le VIH/sida et échangent de la documentation sur les moyens de se protéger des violences sexuelles. Ils s'efforcent de soulever le problème chez eux auprès de leurs parents et de leurs aînés. 

Mais ils ont l'impression que les adultes ne sont pas encore prêts à les écouter. M. Magayane croit que la lutte contre la violence incombe à ceux qui ont vécu la guerre. « Ce qui m'inquiète, c'est que les adultes sont censés protéger les enfants. Ce que nous faisons est en train de tuer notre propre avenir ».

 

 

Viols : le corps des femmes comme champ de bataille (Source Unicef - Brigitte Helali - 8 mars 2007)

République démocratique du Congo, province du Sud Kivu, porte d’entrée de troupes et de milices étrangères, foyer de rébellion depuis 1996.

Ici la situation économique se caractérise par la féminisation de la pauvreté aggravée par le contexte des conflits armés vulnérabilisant les femmes et favorisant des actes de violences sexuelles sans précédent : les agresseurs redoublent d’imagination pour infliger à leurs victimes les sévices les plus dégradants. 

« J’étais dans mon champ en train de couper du bois quand j’ai vu surgir quatre hommes armés, ils m’ont demandé de me déshabiller, j’ai refusé, alors, tour à tour ils m’ont violée ». 


On recense beaucoup de témoignages comme celui de cette femme de 60 ans. Les faits, les circonstances sont tous plus horribles les uns que les autres. Comme pour cette fillette de six ans violée par 6 hommes armés alors qu’elle allait chercher de l’eau. Quel sera son avenir ? Prise en charge au centre DOCS à Goma (Doctor on call for service), elle arrive peu à peu à se remettre de la peur, mais les séquelles physiques sont énormes et les médecins pensent qu’elle sera stérile. 

M. a 20 ans.

C’est aujourd’hui une jeune maman rayonnante et en pleine forme mais elle revient de loin. « J’allais au champ, 6 ou 7 hommes sont arrivés, ils m’ont enlevée, m’ont emmenée dans la forêt. Ils m’ont violée. Je suis restée plusieurs jours prisonnière de leur violence, de leur agressivité. Ils m’ont tellement battue que j’ai eu une jambe et un bras brisé. Je ne me souviens plus de tout. J’étais folle de douleur et de peur. Je ne sais pas comment j’ai réussi à m’échapper. J’ai profité de leur absence, j’ai marché longtemps, je me suis traînée jusqu’à un village. Des femmes m’ont soignée pendant plusieurs jours. Mes membres me faisaient mal, mon ventre aussi, j’avais honte, je pleurais tout le temps ». 

Au bout de quelques semaines, M. a été emmenée à Goma, où elle a été soignée par les médecins du centre DOCS : « Ils m’ont prise en charge. Quelques jours après, j’ai appris que j’étais enceinte. C’était horrible, je ne voulais pas de cet enfant…je voulais mourir… Aujourd’hui, ma fille est là, elle a un an, elle m’a aidé à guérir. Je reprends goût à la vie, je suis forte pour elle. J’ai suivi une formation : je veux être conseillère pour aider les femmes qui comme moi sont victimes de viols et de violences ». 



M. a réussi à s’en sortir. Mais beaucoup de femmes culpabilisent après avoir vécu une telle expérience. Ce sentiment est aggravé par l’ostracisme et la stigmatisation qui les frappent dans leur famille, dans leur communauté. 

Depuis 2003, l’Unicef appuie l’ONG DOCS de Goma dans la prise en charge médicale et l’appui psychosocial des victimes de violences sexuelles, femmes et enfants.

 

 

Nouvelles violations des droits des enfants et des femmes dans l'Est de la RDC. (Source News Press 02/01/2009)

L'escalade dans le conflit et les bouleversements au sein des populations, quittant leurs foyers et leurs abris, ont entraîné de nouvelles violations des droits des enfants et des femmes dans l'Est de la RDC, a déclaré aujourd'hui l'UNICEF. L'organisation qui se consacre aux enfants a averti que la situation se détériorait et a exhorté le monde à ne pas se voiler la face devant la position désespérée des enfants et des femmes en RDC.

Depuis que les combats se sont intensifiés dans le Nord Kivu, à la fin du mois d'août, l'accès humanitaire a été limité et intermittent. Les fuites constantes rendent les enfants plus vulnérables à toute une série de maux touchant la protection de l'enfant, notamment la séparation d'avec leurs familles, l'enrôlement dans des groupes armés, la violence et l'exploitation sexuelles, le travail forcé et la maltraitance, et l'interruption des études. (...)

L'UNICEF réagit à des rapports faisant état d'un recrutement et d'une exploitation de grande ampleur par toutes les parties au conflit, en particulier des campagnes massives de recrutement. Depuis septembre, environ 200 enfants ont été enlevés dans le district de Dungu, dans le Nord-Est de la province orientale, par les rebelles ougandais de l'Armée de résistance du Seigneur (Lord's Resistance Army - LRA). L'UNICEF et ses partenaires sont prêts à apporter protection et assistance aux enfants qui se sont échappés ou ont été libérés, et ils aident actuellement 31 enfants qui se sont enfuis des rangs de la LRA. Le mouvement rebelle a en outre récemment attaqué et tué un grand nombre de civils dans cette zone. L'UNICEF distribue des approvisionnements afin de venir en aide aux déplacés.

Des enfants qui avaient été intégrés dans des groupes armés et qui avaient retrouvé leurs communautés sont à présent visés par ces groupes et recrutés à nouveau. Ceci est extrêmement préoccupant et rend particulièrement risquée la situation des quelque 10 000 enfants du Nord Kivu ayant réintégré leurs communautés grâce à l'aide de l'UNICEF. Les acquis des quatre dernières années sont remis en cause.

 On constate une violence et une exploitation sexuelle effrénées dans les villages et les sites pour personnes déplacées dans leur propre pays. Ceci se passe dans l'impunité. À Kanyabayonga, Kayna et Kirumba, on signale le viol de femmes et de filles de tout âge dans les champs et chez elles. Des femmes et des filles parlent d'agressions à l'intérieur des camps et lorsqu'elles s'aventurent à l'extérieur pour ramasser du bois, puiser de l'eau et trouver de la nourriture. Dans le camp de Kibati, des soldats ont enlevé et tenté de violer deux filles ; alors qu'elles tentaient de s'échapper, l'une d'elles a été tuée par balles, alors que l'autre a réussi à s'enfuir et à se cacher. Les deux filles ont participé au programme d'espace ami des enfants bénéficiant de l'appui de l'UNICEF, permettant de protéger des milliers d'enfants ; depuis lors, leurs pairs ont reçu un soutien psychologique et psycho-social afin les aider à faire face à leur deuil.

 Les enfants non scolarisés sont encore plus exposés à l'exploitation, aux violences et par conséquent au VIH/SIDA, ainsi qu'aux grossesses non désirées. Il y aurait eu de l'ordre d'un million d'enfants non scolarisés au Nord Kivu, avant la crise, et depuis des dizaines de milliers d'autres enfants ont dû cesser d'aller en classe.

 Sur le territoire de Rutshuru, 85 pour cent des écoles accueillant environ 150 000 élèves ont été fermées à cause des combats et d'une insécurité généralisée. Aujourd'hui, la plupart des écoles fonctionnent de nouveau, mais un bon nombre de parents ont peur d'envoyer leurs enfants en classe à cause des meurtres, des disparitions, de l'enrôlement forcé qui continuent, et des menaces de conflit. En novembre, dans des régions où se trouvent des personnes déplacées comme Kibati, toutes les écoles ont été occupées soit par des groupes armés, soit par des personnes déplacées. Grâce à des négociations couronnées de succès, à Kibati, toutes les écoles sauf une fonctionnent désormais.

(....)

 

Au sujet de l'UNICEF:

L'UNICEF travaille sur le terrain dans plus de 150 pays et territoires pour aider les enfants à survivre et à prospérer, de la petite enfance à l'adolescence. Plus grand fournisseur de vaccins pour les pays en développement, elle agit aussi en faveur de la santé et de la nutrition de l'enfant, de la qualité de l'eau et de l'assainissement, de l'instruction de base pour les garçons et les filles, pour la protection des enfants contre la violence, l'exploitation et le sida. L'UNICEF est entièrement financée par les contributions volontaires de personnes, d'entreprises, de fondations et de gouvernements.

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