Nouvelle Calédonie. L’immigration métropolitaine fait débat.

Publié le par unmondeformidable

 L’immigration métropolitaine fait débat. Par Claudine Wery. AFP 13 janvier 2009

Attirés par l’euphorie économique, des milliers de métropolitains s’installent en Nouvelle-Calédonie, une immigration qui fait débat dans ce territoire où un processus institutionnel de décolonisation est en place. 

La semaine dernière, un reportage de la chaîne de télévision M6, qui présentait la Nouvelle-Calédonie comme le "dernier eldorado français", a encore une fois attisé la polémique sur ce thème hautement sensible. On y voyait notamment de jeunes métropolitains, fraîchement débarqués, qui décrochaient en une heure un job payé 2.000 euros par mois et entamaient une nouvelle existence sous le chaud soleil du Pacifique dans cette île bercée par les alizés. 
"Depuis ce reportage, on est assailli de candidatures spontanées, dans tous les métiers, de gens qui veulent quitter la morosité métropolitaine", témoigne Pierre-Emmanuel Folch, directeur du développement d’une agence de recrutement.

A Nouméa, l’afflux de métropolitains, surnommés"zoreilles", est perceptible : les prix de l’immobilier flambent, les routes sont engorgées et pique-niquer seul au monde sur un îlot du lagon est un luxe révolu. 
Grâce notamment à l’envolée des cours du nickel, dont elle détient un quart des réserves mondiales, la Nouvelle-Calédonie connaît depuis plusieurs années une croissance économique exceptionnelle. Et malgré la crise mondiale et la chute du prix des matières premières, le "Caillou" ne connaît pas la déprime, les analystes anticipant même un nouveau boum économique, compte tenu de grands projets déjà dans les tuyaux. 
Il n’existe pas de statistiques officielles, mais selon diverses estimations on compterait quelque 30.000 nouveaux arrivants depuis 10 ans pour une population de 250.000 âmes.

"Cette immigration profite à l’économie et la consommation, mais elle aggrave la Calédonie à deux vitesses. Les Océaniens sont les grands perdants du système", observe Mathias Chauchat, professeur de droit privé. 
Alors que l’archipel est en effervescence, les inégalités sociales s’aggravent, laissant à quai une jeunesse kanake peu formée et déchirée entre deux cultures, qui n’a pas pris le train du développement. "Ca va tellement vite. Il y a un tel décalage entre les jeunes des zones difficiles et le train de vie des jeunes Européens des beaux quartiers", constate Elie Poigoune, président de la Ligue des droits de l’homme. 
L’échec scolaire massif des Océaniens est le principal responsable de ce contexte selon une récente enquête de l’Inserm, qui pointait "les fortes inégalités communautaires en matière de réussite scolaire et d’accès à l’emploi".

Plus importantes qu’en métropole,l’addiction à l’alcool et au cannabis et les tentatives de suicide y étaient aussi qualifiées de "préoccupation majeure". Cette fracture sociale et ethnique est d’autant plus inquiétante que l’accord de Nouméa (1998), qui a institué une décolonisation par étapes, a pour socle l’émergence d’une "communauté de destin". Il prévoit ainsi l’élaboration d’une loi pour favoriser l’emploi local tant dans le privé que le public, mais malgré de nombreuses moutures, aucune législation n’a pu être votée depuis 1998 sur ce sujet, qui cristallise les passions.

"L’immigration en soi n’est pas un problème mais il faut d’abord mettre en place un texte sur l’emploi local", avertit un conseiller indépendantiste du gouvernement.

Publié dans Immigrations

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