Niger. Les Nigériens méritent notre respect
Les Nigériens méritent notre respect par Justin Daboné (L’Observateur Ouagadougou 10/07/09)
Au Niger, il ne se passe pas un jour sans que les nouvelles soient mauvaises pour le président Tandja. D’ailleurs, il ne pouvait en être autrement depuis qu’il s’obstine à prolonger son mandat, qui doit prendre fin dans quelques mois. Ce colonel, c’est un esprit très ordinaire, et il est vraiment difficile de comprendre la nature humaine. Chaque jour que le soleil se lève à Niamey, les mauvaises nouvelles arrivent sur son bureau : hier mercredi 8 juillet 2009, la Justice a invalidé la décision du congrès du Mouvement national de la société de développement (MNSD) qui avait écarté Hama Amadou lors d’un congrès extraordinaire tenu le 21 février dernier à Zinder.
L’ancien Premier ministre était accusé de détournement de fonds publics, et une motion de censure avait balayé son gouvernement. Il avait été remplacé à son poste par Seini Oumarou, l’actuel locataire de la primature. En remettant en cause cette décision, la Justice nigérienne vient de démontrer qu’elle n’est pas aux ordres. Elle est là pour dire le droit et on peut dire tout simplement que les Nigériens méritent notre respect. Tandja, qui va boucler ses 10 ans à la tête de l’Etat, veut poursuivre d’autres chantiers qu’il n’a pu achever.
Alors est-ce à dire qu’en dehors de lui aucun Nigérien ne peut exercer le pouvoir ? Ce monsieur exagère tout de même, et c’est normal que les démocrates de son pays se lèvent pour barrer la route à son projet. Au Burkina, on suit tout ce qui passe là-bas, mais si cela se passait chez nous, l’institution judiciaire s’occuperait d’autres dossiers.
Les exemples ne manquent pas, et cela devrait faire réfléchir les gens de robe d’ici. La Justice nigérienne a donné l’exemple, on n’a pas à contourner les textes pour dire autre chose que le droit, même si on a été placé par le chef. C’est ça, faire honneur à sa robe et prouver qu’on a fait de brillantes études dans ce domaine.
Le Niger n’étant pas le Faso, retournons au pays d’Hamani Diori, où, en plus du revers que Tandja vient de subir, quinze partis politiques, tous membres du Front de défense de la démocratie (FDD), ont retiré leurs représentants de la CENI (Commission électorale nationale indépendante).
Un départ massif consécutif à l’obstination du pouvoir à organiser un référendum en violation flagrante des lois de la République. Dans une déclaration rendue publique, les membres de la CENI ayant démissionné dénoncent le reste du bureau de la structure dans son intention d’organiser le référendum anticonstitutionnel, prévu pour le 4 août 2009 et dont la campagne s’ouvre le 13 juillet.
Rappelons que, la semaine dernière déjà, le rapporteur adjoint de la CENI et représentant des organisations de défense des droits de l’Homme avait quitté cette commission pour des raisons similaires, puis c’était au tour de la vice-présidente de la CENI et représentante du barreau de lui emboîter le pas. A présent, apprend-on, la CENI ne comprend plus que quelques représentants des partis au pouvoir dont le MNSD et le CDS de Mahamane Ousmane.
Ce dernier, toujours resté indécis quant à la conduite à tenir, est un véritable calculateur. Aux dernières nouvelles, il semble que les rebelles nigériens menacent de troubler l’organisation du référendum s’il a lieu. Voilà une nouvelle donne qui vient s’ajouter à la chienlit. Décidément, le maître de Niamey est dans une mauvaise passe, et peut-être bien qu’il ne fermera plus l’œil.