France. Réseau pour l’abolition des transports payants vs Régie autonome des transports parisien

Publié le par Un monde formidable

RATP contre RATP : Le Réseau pour l’abolition des transports payants milite pour la gratuité des transports. Inspiré par les mouvements anti-G8, il a créé des mutuelles pour le paiement collectif des amendes distribuées par la Régie autonomePar Sarah Di Nella (Carta. Rome. 23.07.2009)

La RATP est le sigle de la Régie autonome des transports parisiens. Mais aussi celui du Réseau pour l’abolition des transports payants. La première gère les transports publics en région parisienne, le second milite en faveur de la gratuité des transports. “Le collectif”, explique Gildas, un membre du RATP, “est né à l’époque des mouvements anti-G8 à la fin des années 1990. Nous nous sommes inspirés de l’Italie, où des trains avaient été mis gratuitement à la disposition des manifestants qui allaient protester dans toute l’Europe. L’idée nous a plu et nous l’avons reprise. Petit à petit, nous nous sommes mis à réfléchir à la gratuité des transports, au niveau local cette fois, vu la difficulté à se déplacer au quotidien. Et nous avons créé le collectif en 2001.” 



L’objectif est simple : des transports gratuits au même titre que l’éducation ou la santé. “Une revendication de premier ordre. Nous vivons à une époque où les gens en situation précaire doivent se déplacer tout le temps et où les villes ne sont plus organisées autour d’un centre unique. Le droit au déplacement doit être garanti. Sans parler de l’aspect environnemental.” 

Les membres du collectif insistent sur la dimension politique de la lutte, mais l’aspect financier entre aussi en ligne de compte. “La vente des billets, poursuit Gildas, couvre au maximum 25 % des frais de la RATP. Quand nous avons créé le collectif, certains membres du ministère des Transports nous ont même avoué que ces 25 % pourraient être couverts par les économies issues de la suppression du paiement des titres de transport. Le reste des fonds nécessaires à la garantie des transports publics vient de subventions. Si par ailleurs on ne paie plus de billet, on réduit une grande part des coûts de fonctionnement : billetteries, contrôles, système RFID (identification par radiofréquences).” 



Jusqu’à maintenant, le collectif a obtenu la gratuité pour certaines catégories de chômeurs. La RATP – le collectif – insiste aussi sur le fait que plus on vit loin du centre de Paris, plus les transports coûtent cher. La RATP – l’entreprise – divise en effet la région parisienne en 8 zones et le prix du ticket ou de l’abonnement varie en fonction des zones dans lesquelles les usagers voyagent. C’est ainsi que ceux qui s’expatrient en banlieue pour trouver des logements plus abordables doivent payer davantage pour utiliser les transports publics. 


“Beaucoup de gens, ajoute Gildas, se sont joints à nous après l’entrée en vigueur du pass Navigo – qui existe depuis quelques années mais qui est devenu obligatoire en janvier.” Ce pass utilise le système RFID et rend “traçables” tous les trajets des usagers de la RATP. Une violation des libertés individuelles qui a entraîné un autre phénomène, celui des amendes. Nombreux sont ceux qui participent aux “actions de gratuité illégale” simplement en voyageant sans billet. Ou qui adhèrent aux mutuelles : ces réseaux rassemblent une quarantaine de personnes qui paient une quote-part de 7 euros chacune afin de constituer un fonds pour financer les amendes de ceux qui voyagent sans payer. Le montant des amendes va de 20 à 72 euros et l’abonnement le moins cher coûte 50 euros. “La mutuelle”, explique Julien, nom d’emprunt d’un des fondateurs de ces groupes, “est née il y a quelques années en copiant ce qui se faisait en Suède ou en Finlande. Au début, nous étions peu nombreux. Nous avons tout de suite insisté sur la dimension humaine de notre action. Nous sommes une trentaine ou une quarantaine dans chaque mutuelle. Nous nous réunissons tous les mois, les gens apportent leur contribution et leurs amendes. Le fonctionnement est simple. C’est un endroit où l’on s’échange aussi des techniques de fraude. Aujourd’hui, ces systèmes mutualistes se développent, il y en a même qui voient le jour dans les universités ou dans les quartiers populaires. Quatre sont désormais très actifs dans la région parisienne, d’autres sont sur le point de naître et nous rencontrons sans cesse de nouvelles personnes qui veulent suivre notre mouvement. Cette semaine, par exemple, des membres d’un collectif antipub sont venus nous voir.” 



Depuis 2001, il existe une loi qui institue un délit de “fraude à répétition” qui sanctionne ceux qui sont attrapés sans billet plus de dix fois dans l’année et qui ne paient pas leur amende. La peine maximale encourue s’élève à 7 500 euros d’amende et six mois d’emprisonnement. “Peu de gens sont victimes de cette loi car les mutuelles paient les amendes, précise Julien. Mais plus les mutuelles se développeront, plus l’arsenal juridique deviendra complexe pour s’adapter à nos formes de lutte et tenter de nous arrêter. Par exemple, le montant des amendes ne cesse d’augmenter.”

Publié dans Europe de l'Ouest

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