France. Contrôles d’identité : abus de pouvoir ?
Contrôles d’identité : abus de pouvoir ? Par Georges Moreas. 05 avril 2009 (Source : Police et cetera)
« Les pataquès arrivent toujours avec les honnêtes gens », c’est ce que disent les vieux flics. C’est typiquement le cas des contrôles d’identité. À Strasbourg, ils ont été multiples, et ils ont parfois donné lieu à des incidents. Il faut dire que ces vérifications sont souvent perçues comme une mesure vexatoire ou injustifiée. Un abus de pouvoir. Et si les policiers ne montrent pas une certaine diplomatie, il est fréquent que le ton monte - et cela finit « au poste ».
Le moyen le plus simple de répondre à un contrôle est de montrer sa carte nationale d’identité. Mais elle n’est pas obligatoire. À défaut, n’importe quel document officiel, à condition qu’il porte une photo, est souvent jugé suffisant.,La personne qui ne peut pas (et a fortiori qui ne veut pas) justifier de son identité est présentée à un OPJ. Elle n’est pas placée en garde à vue, mais en « rétention », le temps de la vérification. Au maximum 4 heures, (depuis le début du contrôle). Elle doit être informée de ses droits : avis au procureur et possibilité de prévenir un proche (s’il s’agit d’un mineur de 18 ans, c’est fait d’office). La personne est alors mise en demeure de fournir tous les éléments nécessaires à son identification. Sur autorisation du procureur, une fiche anthropométrique (empreintes, photo…) peut être dressée. À l’issue de la vérification, si l’identité de la personne est établie, l’affaire s’arrête là. Les informations recueillies ne doivent pas être archivées et les procès-verbaux sont supposés être détruits au bout de six mois. Si une infraction est constatée, la personne est alors placée en garde à vue (le temps passé en rétention s’impute sur la durée de la GAV).
Il existe deux sortes de contrôles d’identité : le contrôle de police judiciaire et le contrôle de police administrative. Mais soyons clair, que l’on soit dans l’un ou l’autre cas, pour « l’usager », cela ne change rien.
Le contrôle de police judiciaire (art.78-2 du CPP) permet à l’OPJ de vérifier l’identité de suspects, de témoins, etc. à l’issue d’un crime ou d’un délit, ou pour prévenir celui-ci. Il donne le droit aux représentants de l’ordre de « visiter » un véhicule (art. 78-2-3).
Le contrôle de police administrative a été introduit dans notre législation par la loi « sécurité et liberté » de 1981. Elle a été modifiée plusieurs fois. La mouture actuelle date de 1993 : « L’identité de toute personne, quel que soit son comportement, peut être contrôlée (…) pour prévenir une atteinte à l’ordre public, notamment à la sécurité des personnes ou des biens ».
Il existe d’autres contrôles : réquisition du procureur de la République, contrôle « Schengen », lutte contre le terrorisme, etc., mais en fait, cela n’a guère d’importance… On ne se voit pas demander à l’agent de police dans quel cadre juridique il opère. Il n’est d’ailleurs pas sûr qu’il le sache, se contentant le plus souvent d’appliquer les instructions reçues.
Autrement dit, il vaut mieux se soumettre. Car un refus entraînerait quasi systématiquement une procédure pour rébellion, voire pour outrage, et cela même s’il apparaissait par la suite que le contrôle n’avait pas de bases légales. Les vérifications sont effectuées par un officier de police judiciaire, ou sous son autorité par des agents de police judiciaire ou des agents de police judiciaire adjoints. Autrement dit, tous les policiers et gendarmes sont susceptibles de l’effectuer.
Les agents de police municipale ne sont pas autorisés à effectuer des contrôles d’identité. Néanmoins, ils sont habilités à relever l’identité des contrevenants aux arrêtés du maire et à certaines contraventions. Si un individu refuse ou se trouve dans l’impossibilité de justifier de son identité, l’agent en rend compte à l’OPJ compétent. Celui-ci peut lui demander de lui présenter l’individu séance tenante.
Laurent Opsomer, qui suit de près l’actualité sur le Net, m’a envoyé ce lien sur Lepost où l’on voit des fonctionnaires municipaux et des agents de la police nationale lors d’un contrôle d’identité à Strasbourg. Un policier tente d’interdire au cinéaste amateur de filmer : « Vous n’avez pas le droit de filmer des policiers… ». Laurent me demandait s’il existe une loi qui l’interdit… Je n’ai trouvé aucun texte, et je ne le pense pas, mais si quelqu’un en sait plus … En revanche, dans une telle situation, il y a fort à parier que le cameraman fasse l’objet d’un contrôle d’identité - et l’on reprend tout depuis le début…