Afghanistan. La pelote afghane.

Publié le par unmondeformidable

La pelote afghane. Par Luis Lema (Source Le Temps.ch. 28 /03/ 2009)

C’est la fin d’une longue diversion. Sonnant d’une certaine manière – de façon encore prématurée – le glas de la guerre en Irak, Barack Obama a amorcé vendredi le grand virage tant attendu en direction de l’Afghanistan, en y dessinant ce qu’il appelle une «stratégie complète» afin de détruire la menace que représentent Al-Qaida et les talibans. Plus de sept ans après le 11 septembre, il désigne les montagnes afghanes comme la priorité qui, à ses yeux, n’aurait jamais dû cesser d’être celle de l’administration américaine. Mais, comme l’Irak fut la guerre de George Bush, celle d’Afghanistan devient ainsi la sienne. C’est sur les résultats qu’il obtiendra ici que se jugera une bonne part de sa politique internationale.

La stratégie est aussi ambitieuse que les enjeux en présence sont importants. Loin de se réduire à la capture d’Oussama ben Laden (est-il encore réellement vivant?), le conflit qui s’est désormais largement déplacé au Pakistan est une pelote dont il est extrêmement difficile de tirer les fils entremêlés. Redonner confiance aux populations envers les gouvernements afghan et pakistanais afin qu’elles s’opposent clairement aux extrémistes; offrir à ces mêmes populations des moyens d’existence autres que l’opium ou la guérilla; mettre fin au double jeu des puissants services secrets pakistanais; donner les moyens à l’armée américaine de reprendre le contrôle militaire, si ce n’est du pays tout entier, au moins de certaines régions à partir desquelles l’avancée pourrait se réaliser…

Au demeurant, la pelote est plus vaste encore puisqu’elle comprend aussi l’Inde (dont l’inimitié offre au Pakistan une raison rêvée de ne pas s’en prendre de manière frontale à Al-Qaida), l’Iran, la Russie, ou encore la Chine, reconnaissait Barack Obama.

La volonté de «gagner les cœurs» des Afghans et des Pakistanais se révélera plus ardue à réaliser que dans un Irak où les chefs de tribu ont été achetés grâce au dégoût de plus en plus marqué que provoquaient les agissements d’Al-Qaida. Ici, ce sont surtout les Américains qui ont commencé à susciter ce dégoût croissant à force de lâcher des bombes de leurs avions sans pilote, qui tuent souvent hommes, femmes et enfants innocents.

Entre un objectif trop vaste qui consisterait à transformer la région en un paradis démocratique et celui, trop étroit, qui entend gérer la guerre comme un jeu vidéo avec des avions télécommandés, la marge existe, mais elle est étroite. La «guerre d’Obama» ne fait que commencer.

Publié dans Asie centrale

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