Tunisie. Le tourisme médical à la croisée des chemins

Publié le par Un monde formidable

Tunisie : Le tourisme médical à la croisée des chemins  (Source : African Manager- 18-08-2009)

Timide à ses débuts, le tourisme médical tunisien amorcé il y a 15 ans s’organise et se professionnalise de plus en plus, pour se signaler par offrir une large palette de services, offrant un rapport qualité/prix fort concurrentiel à l’international. Ce tourisme de niche, très lucratif, revêt une dimension de plus en plus stratégique, d’autant qu’il est générateur d’emplois directs et indirects, de services connexes et qu’il est source de rentrées de devises, par visiteur, dix fois plus importantes que celle du tourisme classique.

Pus de 115 cliniques privées recensées, une capacité d’accueil 2747 lits (hors infrastructures hospitalières publiques), une pléthore de  médecins compétents, multidisciplinaires, des coûts de soins de 40% à 70% moins chers que ceux pratiqués en Europe, la possibilité de jumeler ces soins médicaux avec un séjour en bord de mer, sous le soleil, autant d’avantages comparatifs qui placent la destination Tunisie comme une alternative de choix, une situation qui fait grincer beaucoup de dents parmi les praticiens européens, particulièrement les Français d’entre eux.   En accueillant plus de 120 000 touristes par an,  la Tunisie se place désormais comme l’une des destinations phares du sud de la Méditerranée en matière de tourisme médical.  L’offre tunisienne en termes  de santé s’adresse à deux publics distincts.

Le premier public est composé à 70% de maghrébins (libyens, algériens, mauritaniens) et de 12% d’africains (maliens, ivoiriens, béninois, etc.…), ces patients ont la particularité de rechercher en Tunisie des spécialités médicales indisponibles ou peu développées dans leurs pays d’origine. Ces patients qui font des centaines, voire des milliers de kilomètres, peuvent venir pour une simple consultation ou encore pour subir des opérations médicales complexes. Le plus souvent, ces patients sont accompagnés d’un proche, voire de plusieurs membres de la famille, notamment pour les Algériens et les Libyens . Ces touristes maghrébins et subsahariens, qui boudent le plus souvent les hôtels, ont la particularité de faire profiter par leur séjour les secteurs du petit commerce, de la location privative d’appartements et de villas à des particuliers, en passant par les services de restauration.

Le deuxième public qui forme près de 18% du contingent des touristes de santé, est principalement européen, il recherche des spécialités chirurgicales, jugés trop onéreuses dans les pays d’origine. Ce public est principalement composé de femmes recherchant des spécialités en chirurgie esthétique, faciale ou réparatrice, le plus souvent non remboursées par leur système de sécurité sociale. Des personnes du troisième âge forment aussi une bonne partie de ce groupe et recherchent pour leur part, des formes de soins palliatifs (balnéo, spa), à l’instar de la thalassothérapie, la Tunisie étant la deuxième destination mondiale pour les curistes. Ces personnes âgées peuvent aussi bénéficier des soins dentaires avec des prix sans commune mesure avec ceux pratiqués en Europe, et ce, à moins de 2h ou 3h d’avions de leur pays d’origine.  Ces touristes d’un nouveau genre peuvent dépenser jusqu’à 4000 euros (7200 dinars) pendant leur séjour contre 300 euros (540 dinars) pour un touriste ordinaire. Les prix des prestations défient aussi toute concurrence. A titre d’exemple, une opération à cœur ouvert coûtera 2500 euros (4500 dinars) en Tunisie contre 5500 euros (10000 dinars) en France.  Un lifting cervico-facial coûte 3200 euros (5750 dinars) contre plus de 5000 euros (9000 dinars) en France. Pour leur part, les prothèses dentaires et la chirurgie ophtalmologique sont jusqu’à 70% moins chers qu’en Europe.

Les autorités tunisiennes, qui ont jusque-là laissé ce marché s’autoréguler, ont décidé de soutenir le tourisme de santé, le dossier ayant fait l’objet d’un conseil ministériel , le 5 décembre 2008. Il ressort de ce conseil que la Tunisie ambitionne de devenir à l’horizon 2016 un pôle d’exportation des services de santé. La mise en place d’une stratégie a réellement débuté après le lancement  par le ministère de la Santé d’une étude sur le secteur de la santé et de ses perspectives à l’export. L’étude devra permettre de définir les contours de la future réglementation en la matière, des assurances, des visas de séjour ou du transport. Des plans d’action axés autour de quatre thèmes sont bel et bien déjà en place, et font l’objet d’une promotion de la part l’Agence Tunisienne de promotion de l’investissement extérieur (FIPA). Ces 4 thèmes se déclinent en quatre messages clés comme « Tunisie, destination de soins », « Tunisie, destination de convalescence », « Tunisie, destination pour la retraite » et « Tunisie, site d’investissement lié à la santé ».  Il est à noter que cette stratégie ambitionne d'attirer tout particulièrement les retraités d’Europe et de France en particulier en les encourageant à s’installer en Tunisie. Le nombre de retraités en France serait de l’ordre de 10 millions de personnes, avec des revenus variant entre 1000 et 3000 euros, soit une manne pour un pays qui offre le soleil, les soins et une proximité géographique  avec l’hexagone. Cette niche est d’autant intéressante que la plupart des maisons de retraite ou de soins aux personnes du troisième âge sont saturées. La nouvelle stratégie en matière de santé ambitionne aussi de multiplier par 10 les revenus générés par l’industrie pharmaceutique nationale.

Des politiques certes ambitieuses qui exigent de nouvelles législations et la prise de nouvelles dispositions, d’autant que la concurrence, du Maroc notamment, se fait vive. Les Marocains ont déjà réussi à attirer plus de 100 000 retraités qui ont acheté des villas et des riads dans les villes de Marrakech, Tanger ou Fès. Un tourisme résidentiel où la Tunisie peine encore à percer à cause des procédures complexes et des autorisations multiples. Toutefois, les  législations adoptées durant le mois de juillet, notamment pour l’acquisition par les étrangers de résidence en Tunisie laissent espérer que ce retard sera comblé.

L’annonce par le groupe japonais Tokyshuka Medical Corporation, de sa volonté  de créer pour  55 millions de dollars, le premier hôpital  privé en Tunisie, conjuguée à la création, d’ici 2015,  d’une véritable ville médicale par le groupe émirati Al Mâabar, dans la région de l’Ariana démontre l’intérêt grandissant pour la Tunisie en que destination de santé.

Publié dans Afrique du Nord

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