France. Identité

Publié le par Un monde formidable

Identité par Bruno Frappat (La Croix. 14/11/09)

La question tourne à l'obsession: qui sommes-nous? L'identité nationale, l'identité française, l'identité de la France, quelle que soit la manière dont on tourne les mots est une façon maladive de tourner autour du pot. Et, surtout, d'une impossibilité radicale. Si l'on savait, depuis le temps, ce que signifie "être Français", cela se saurait. Montaigne, Pascal, Descartes, Rousseau, Voltaire, Condorcet, Michelet, Hugo, Péguy, pour ne citer que les plus anciens, ont pressuré leur intelligence pour nous aider dans cette quête identitaire.

Les rois, l'Eglise, l'armée, l'école, les républicains, les révolutionnaires, les collabos, les résistants, les gaullistes, les communistes, les modérés, les démocrates-chrétiens: tous, un jour ou l'autre, ont tenté d'apporter leur réponse. Chacune avait sa part de vérité, mais aucune définition n'a jamais convaincu tout le monde. 

Pour une raison très simple, sans doute, insondable et frustrante: être Français (ou Persan ou Allemand ou Guatémaltèque) cela ne se résume pas. Il ne suffit pas de dérouler, comme sur les boîtes de médicaments, la liste des "composants" et des molécules, pour convaincre, pour expliquer ce composé subtil, instable que l'on appelle "la France" (ou la Perse, ou l'Allemagne, ou le Guatemala). Comme il serait agréable de pouvoir être simpliste! Comme il est dangereux de nous pousser à l'être. Le faux débat sur l'identité, débat sans issue, est une matrice de frustrations à venir. Le signe aussi d'un mal-être: gratter une plaie ne la soigne pas. Il y a des questions avec lesquelles il faut vivre comme questions. Gare aux réponses qui ferment les portes de la nuance, de l'incertain, en somme: de la vie.

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