France. Chroniques marseillaises(15): les "ordures" de Marseille et le contribuable / 80% des marseillais éligibles à une HLM
Affaire Alexandre Guérini : le contribuable doit-il payer les mis en examen ? par D.T. et F.G. (La Provence. Créé le 15/05/2011)
Et si les fonctionnaires mis en examen dans le volet de "détournement de fonds publics" présumés, liés à l'exploitation abusive de la décharge du Mentaure, dans l'affaire Alexandre Guérini, devaient assurer demain leur défense tout seuls ? Un recours vient en effet d'être déposé le 4 mai, devant le tribunal administratif de Marseille, par trois élus d'opposition d'Aubagne. La Communauté du Pays d'Aubagne et de l'Etoile et son président d'alors, Alain Belviso, ont pris, le 10 décembre, une décision de protection juridique et donc de prise en charge des frais d'avocats de trois d'entre eux, Daniel Pinna, ex-directeur général des services, Michèle Duval et Christophe Bringuier, employés. Mais trois élus d'opposition, Sylvia Barthélémy, Joseph Pittera et Alain Grégoire, ne l'entendent pas ainsi.
Après avoir passé les textes au crible de l'analyse critique, ils ont considéré que cette "assistance juridique appelle les plus vivescritiques". Ils tiennent à indiquer que "la collectivité publique est tenue d'accorder sa protection au fonctionnaire dans le cas où il fait l'objet de poursuites pénales à l'occasion de faits qui n'ont pas le caractère d'une faute personnelle", ce qui pour les auteurs du recours n'est pas le cas. Pour eux, "le détournement de fonds est l'archétype des actes commis pour la satisfaction d'un intérêt personnel", expliquent-ils. Ils rappellent en outre que la Communauté d'agglomération s'est constituée partie civile depuis en tant que victime et que cette décision est intervenue après la démission du président Belviso et la nomination à la présidence par intérim de Daniel Fontaine, maire d'Aubagne. Ils ne manquent pas de rappeler enfin, à l'appui de leur requête, que les fonctionnaires et élus de la ville d'Aubagne ont tristement bénéficié de la même protection lors de la fraude électorale d'Aubagne de 1998 "aux frais du contribuable".
Marseille : l'état d'urgence pour le logement par Sophie Manelli (La Provence. 11/05/2011)
Quand un Marseillais interpelle un élu local, ce n'est pas pour lui parler de politique, ni d'aménagement, ni même d'insécurité ou de la propreté de sa rue. "Huit fois sur dix, c'est pour demander un logement", constate Samia Ghali, sénatrice-maire PS des 15e et 16e arr., et vice-présidente de MPM déléguée au logement social, qui ne peut"plus faire un pas" sans être harcelée par ses administrés. Qu'ils soient de droite ou de gauche, tous les élus le confirment : Avant même le chômage, le problème du logement est devenu la préoccupation numéro un des Marseillais. D'où ces "États généraux" convoqués hier au siège de Marseille Provence Métropole. Pour la première fois en France, tous les acteurs du logement réfléchissent ensemble à "une politique communautaire de l'habitat" pour MPM, où 80 à 100 000 habitants supplémentaires sont attendus d'ici 20 ans. 37 000 demandes de HLM Particulièrement préoccupante, la question du logement social.
Deux chiffres pour en donner la mesure : 80 % des Marseillais sont éligibles à une HLM (60 % des habitants de MPM) en raison de leurs faibles revenus, alors qu'on enregistre à Marseille 37 000 demandes en attente sur les listes des bailleurs sociaux ... Avec 19,22 % de logement sociaux (soit 72 826 HLM), la cité phocéenne a beau friser le taux de 20 % imposé par la loi SRU, la pénurie d'aggrave :"faute de terrains disponibles, on n'arrive pas à suivre le programme de démolition-reconstuction de l'Anru", résume Samia Ghali.
Résultat : "On démolit plus qu'on ne construit. Actuellement 850 logements sociaux détruits n'ont pas été remplacés. Et si les cités des Flamands et de la Savine doivent être démolies à cause de la présence d'amiante, ce seront 2 500 appartements qu'il faudra reconstruire". Sachant que les fonds d'État non dépensés avant 2013 seront perdus, il y a urgence à trouver des terrains. "Ceux de l'État par exemple, qui dispose de nombreuses réserves", suggère Samia Ghali. Mais le foncier n'est pas tout. "Dans les 9e et 10 e arr., on a des terrains, on construit du logement social, mais on arrive au point de rupture car les collectivités ne suivent pas pour financer les équipements ", explique Lionel Royer-Perrault, député suppléant du maire de secteur UMP Guy Teissier.
La situation est encore plus tendue dans les 13-14e : un secteur en plein boom démographique qui manque d'écoles, de crèches, de transports. Et même quand les équipements sont là, certains élus de secteur (et de nombreuses communes autour de Marseille) rechignent à construire des HLM. En témoignent les écarts entre les différents arrondissements : de 42 % de logement social dans le 16e, à 7,2 % dans le 8e ! Un déséquilibre que la loi Boutin oblige désormais à corriger, en exigeant une "mixité sociale à l'arrondissement".
"Tous les secteurs ont besoin de logements sociaux et faire des HLM sur son secteur ne fait pas perdre les élections", ironise Samia Ghali, qui réclame à l'État un "plan Marshall pour le logement à Marseille" et appelle les collectivités à "dépasser les clivages politiques". En attendant, les élus locaux continueront à gérer la pénurie. Avec les dérives que cela peut entraîner. Car que deviennent toutes les demandes de logements qui s'entassent dans les tiroirs des édiles ? "80 % des attributions de HLM se font sur recommandation d'un membre des commissions", confie un conseiller municipal. Certains diront que c'est du clientélisme. D'autres estiment simplement qu'ils "rendent service".