Congo. Denis Sassou –Nguesso, cet autre symbole de la vieille Afrique
Denis Sassou –Nguesso, cet autre symbole de la vieille Afrique (L’Observateur. Ouagadougou. 07/06/09)
Pour annoncer officiellement sa candidature, l’homme fort de Brazzaville n’a pas fait dans la dentelle. En effet, il a organisé, samedi dernier, un meeting devant des milliers de personnes mobilisées pour la circonstance. Sauf tremblement de terre donc, le chef d’Etat en exercice sera sur la liste de départ du marathon vers le palais présidentiel.
Une course gagnée d’avance par l’actuel locataire de la présidence congolaise qui n’aura pas besoin de dépenser beaucoup de souffle pour surclasser ses concurrents.
On imagine mal ce porteur du dossard numéro 1 perdre la course, lui qui a déjà une longueur d’avance avec tous les moyens humains et matériels, y compris ceux de l’Etat, dont il dispose pour aller en campagne électorale ; sans oublier, si besoin était, les fraudes massives qui lui permettront de se scotcher à son moelleux fauteuil.
Dénis Sassou Nguesso, qui a fait 25 ans de règne dont 5 d’intermède, n’est pas de ceux qui pensent d’une autre vie après la présidence ; un peu à l’image de son voisin et gendre, Omar Bongo, qui se croit immortel à tel point qu’il refuse de se reconnaître gravement malade. Il ne devrait cependant pas ignorer que tout homme, quels que soient son pouvoir et sa richesse, ne peut empêcher son horloge biologique de tourner et le temps de faire son œuvre. L’écrivain français Jacques Prévert ne disait-il pas qu’on a beau avoir une santé de fer, on finit toujours par rouiller ?
Le président congolais fait donc partie de cette race de dirigeants africains qui pensent qu’ils sont nés pour commander les autres et entendent de ce fait rester aux affaires par tous les moyens ; dans la jouissance des plaisirs mondains car c’est connu, le beau-frère de Bongo a un goût prononcé pour le luxe. Mais la candidature de l’ancien chef des milices Cobras intervient au moment où il est poursuivi par de nombreuses organisations internationales dont Transparency international, pour détention de fonds et de biens mal acquis.
C’est dire que celui qui est en passe de rebeloter pour un nouveau bail à la présidence congolaise ne se fait pas du mauvais sang. Vestige de la vieille Afrique qu’il est, ce chef d’Etat qui ne veut pas laisser la place à la jeune génération n’est nullement ébranlé par ces scandales d’autant plus qu’ils n’auront aucune incidence sur sa réélection. Et avec ces dinosaures dignes de républiques bananières, la Françafrique aura encore de beaux jours devant elle.
Sassou Nguesso, candidat à sa propre succession : un nouveau bail de 7 ans ? D. Evariste Ouédraogo. (L’Observateur. Ouagadougou. 07/06/09)
Dans une Afrique où les régimes en place sont comme des monarchies, c’est bien le contraire qui aurait étonné de la part d’un « Dengues », autre nom du maître de Brazza. Il n’y a rien de plus normal sous nos tropiques, qu’à 66 ans, DSN veuille briguer un deuxième mandat de 7 ans, surtout que la constitution congolaise du 20 janvier 2002 autorise deux septennats consécutifs.
Arrivé au pouvoir après un coup de force en 1979, Nguesso l’a perdu 13 ans plus tard lors d’élections multipartites qui ont vu la victoire de Pascal Lissouba. Celui-ci sera chassé du fauteuil présidentiel pendant la guerre civile de 1997, après laquelle son prédécesseur s’est réinstallé au sommet de l’Etat.
Ainsi donc, Denis Sassou Nguesso a choisi de rempiler, après le décès de sa fille Edith-Lucie, et de son gendre de président, Omar Bongo Ondimba, cet autre « dinosaure » qui a régné au Gabon durant 41 ans. Sa campagne, il opte de l’entamer le 26 juin prochain, et ce, pour deux semaines.
Il va sans doute faire son bilan mais aussi et surtout expliquer à ses concitoyens ce qu’il leur réserve pour les sept ans à venir. Pour l’instant, le chef de l’Etat, même s’il est convaincu de survoler la « compétition », doit faire face à une quinzaine de candidats, dont son ancien Premier ministre Ange Edouard Poungui.
Le moins que l’on puisse dire sur cette joute électorale qui pointe à l’horizon au Congo, c’est que l’opposition, ici comme ailleurs sur le continent, qui semble s’avouée vaincue, s’illustre de fort belle manière par son inconséquence, à travers un soutien sans faille à l’homme du moment, qu’il a pourtant farouchement combattu en d’autres temps.
Ces caciques d’autrefois ont pour noms Jacques Joachim Yhombi-Opango, président de la République de 1977 à 1979 et Premier ministre de Lissouba (juin 1993, août 1996) ; Bernard Kolélas, également Premier ministre de Lissouba (en 1997) ; Charles David Ganao et l’intellectuel Théophile Obenga. Ils ont tous, chacun à son tour, usé de périphrases très recherchées pour louer, comme il faut, les qualités de leur candidat, « l’infatigable bâtisseur ».
Au cours du meeting de samedi dernier, ces opposants d’hier, ténors historiques de l’opposition, prêts à réagir au moindre appel du pied, ne se sont pas du tout fait prier pour faire allégeance au président sortant…mais qui va certainement rester scotché à son trône après le 12 juillet 2009, date de la présidentielle. Il en a les moyens.
L’Etat, c’est d’abord lui, et sa propre fortune, amassée comme celles de bien d’autres le long de sa chefferie, fait qu’il n’a nullement peur de ceux d’en face. Sa force de frappe, il l’a d’ores et déjà démontrée à l’occasion de son « coming out » du week-end écoulé, et, comme qui dirait, « ce qui reste dans le sac dépasse en quantité et en qualité ce qu’on en a déjà sorti ».
Au Congo-Brazza, les jeux sont presque faits. Ce n’est donc pas aller trop vite en besogne que d’affirmer que Sassou Nguesso aura un nouveau bail de 7 ans. Sous nos cieux, c’est bien connu, très rarement, un président organise des élections et les perd.